Céline Dehors et François l’Explorateur — Aspirants, chercheurs en liberté, expérimentateurs d’idées loufoques. — Et accessoirement auteur de « Ce que le Souffle m’a donné »

jeudi, juillet 20, 2017

Se sent-elle différente ?


Que pense-t-elle lorsque, debout tout en haut du jeu municipal à attendre que les enfants 3 ou 4 ans plus âgés qu'elle la rejoignent, un homme dit à son enfant « Allez, vas-y, regarde : même la petite fille y arrive ? »


Que pense-t-elle lorsqu'elle comprend que le cahier de vacances que je lui ai choisi n'est pas pour son âge ?

Cela vient-il d'elle lorsqu'elle nous dit qu'elle veut aller à l'école même si à l'école les enfants ne décident rien, qu'elle a vu que c'était la maitresse qui choisissait tout ?

Qu'y a-t-il derrière son sourire pincé lorsqu'on lui pose une question à laquelle elle ne sait pas répondre (du style : et où habites-tu ?) et qu'on lui dit « Normal, tu es encore petite. »

Qu'a-t-elle en tête lorsqu'elle dit « Les gens ne se rendent pas compte… » Voit-elle mon regard interrogatif vers François quand elle rajoute : « C'est de la folie ! »

Comment réagit-elle à l'intérieur face à toutes les comparaisons, face à la condescendance des adultes ? Mâche-t-elle sa langue en silence, ou baisse-t-elle les yeux parce qu'elle a honte de ne pas avoir les mots pour répondre à tout cela ? Devrais-je lui montrer l'exemple ou la laisser trouver elle-même ce qui lui convient de faire ?

A-t-elle conscience qu'elle est différente ? Comme tout un chacun est différent mais que la société voudrait ne pas avoir à y penser. Cherche-t-elle à combler cette différence ou l'accepte-t-elle comme telle ? Se sent-elle seule parfois lorsqu'on traite avec évidence des choses qui n'en sont fondamentalement pas ? Quelle arme suis-je capable de lui fournir face à cela ? Devrais-je me montrer brave et confiante ? Pourquoi est-ce elle qui cherche à me rassurer ?

Comment éduque-t-on un enfant à la différence ? A la sienne, et à celle des autres, dans un milieu où l'on a tant l'habitude de juger ? Dans un milieu où l'on fait des enfants les instruments des adultes ? Comment aide-t-on un être dans le combat de sa personne ? Comment lui apprend-t-on ce que lui seul peut savoir ?

Est-ce moi qui me fait des idées sur ce que dissimule ton regard ? Dis voir, ma fille, aimes-tu être différente ? Ou préfèrerais-tu qu'on se le cache, qu'on le cache aux autres ? …mais alors pourquoi ?

7 commentaires:

  1. Je ne sais pas comment on éduque à la différence, mais je suis sûre que ta fille se sent (et se sait) différente. Quoi que tu fasses, même si tu fais bien, elle se heurtera sûrement à des incompréhensions et à des murs dans sa vie, comme toi, moi et bien d'autres. Mais je pense qu'il ne faut pas lui cacher sa différence, mieux vaut lui expliquer comment elle fonctionne, pourquoi les autres ne fonctionnent pas pareil et pourquoi elle doit faire preuve de prudence dans certaines circonstances. C'est à la fois une chance et une malédiction d'être surefficient, n'est-ce pas...

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    1. Bonjour Nadège !

      Je ne veux pas parler de surefficience à propos de ma fille parce que… et si je me trompais ? Ce serait terrible, cette étiquette, si ce n'en était pas une bonne ! Elle n'a que trois ans, on ne peut vraiment savoir, juste "soupçonner".
      As-tu déjà été confrontée à la question face à des enfants de ta connaissance ? Je la trouve bien plus délicate à aborder quand il s'agit d'autre personne que soi.

      N'empêche, comme tu le dis : il ne vaut mieux rien lui cacher. Je crois aussi qu'elle se sent différente. Sans être sûre que ce soit une solution, je préfère encore attendre avant de lui présenter des mots pour se l'expliquer. Même différente, elle est avant tout une enfant d'humain, je lui laisse le temps d'apprendre ce que cela signifie.

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    2. Bonjour Céline,
      Ah oui, question délicate ! Je n'ai pas d'enfant, donc je ne sais pas dans quelle mesure on peut se fier à son instinct de mère, ni dans quelle proportion on peut projeter (de manière erronée) ce que l'on est sur son enfant. Cela dit, s'il s'avère que ta fille est vraiment surefficiente (ce qui, à te lire, semble plus que probable), je suis sûre que tu utiliseras la meilleure "stratégie" pour le lui faire savoir et l'éduquer à sa différence, lorsque tu jugeras le moment venu.
      Pour ma part, j'aurais aimé qu'à mon époque les psys, les enseignants et mes parents soient plus sensibilisés à cette question. Cela m'aurait évité pas mal d'écueils en grandissant, je pense...

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    3. Même en étant moi-même mère, je ne peux pas répondre à ces questions. Je sais seulement d'expérience que la manière dont l'on perçoit son propre enfant est bien différente de celle des autres. Cela ne veut pas dire que les parents sont aveugles, ils voient et comprennent des choses qui sont invisibles à l'entourage plus éloigné.
      J'aurais aimé moi aussi que les personnes qui m'ont éduquée soient plus informées sur la question. J'ai sur moi une lourde frustration de n'avoir pas su mieux me comprendre jeune et enfant.

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  2. Peut-être te projettes-tu un peu sur elle, peut-être est-ce aussi l'instinct maternel et ton analyse personnelle qui te fait ressentir ces choses avant même qu'elle ne sache les reconnaître.

    "Comment lui apprend-t-on ce que lui seul peut savoir ?" C'est une excellente question, qui je trouve s'applique à tous les âges de la vie.

    J'aime aussi quand tu parles de la condescendance des adultes, et du fait que les enfants sont leurs instruments, pour certains. C'est des idées que je savais en moi sans avoir jamais vraiment posé de mots dessus.

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    1. Bonjour Cléa.
      Tu as bien mis le doigt sur ce qui m'interroge. Je vois tant de moi chez ma fille. Elle me ressemble, c'est certain, mais elle n'en demeure pas moins une personne différente de moi. Ai-je même le droit de transposer une seule de mes préoccupations existentielles sur elle ?

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    2. J'ai envie de répondre non, qu'elle sera probablement suffisamment embarrassée des siennes propres, mais n'étant pas mère je ne sais pas dans quelle mesure cela est possible, faisable. Même si tu ne lui énonces pas clairement tes préoccupations, peut-être les comprendra-t-elle d'elle même en grandissant...

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Céline.

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